INTERVIEW DU PEINTRE AUQUIER

PAR MYRIAM ANGILELLA
directrice de la galerie l'ARCHE à ALES.

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VISIONS huile sur toile 65 x 54 cm

 

M.A.: Joseph AUQUIER j'expose tes tableaux dans ma galerie
depuis plusieurs années, et j'aurais quelques ques-
tions a te poser; tout d'abord comment naît un tableau?

A. : Je ne sais pas comment naît un tableau. Je ne sais pas
ce qui va venir. Je pars avec de la couleur. Je cré, le
tableau commence a me parler, c'est lui qui m'impose son
idée, sa direction. Je prends le tableau en marche, je ne
sais pas ou je vais, je pars en voyage.

M.A.: Y a-t-il une base? un canevas?

A. : Je ne dessine jamais, je ne pars pas d'idées pré-
consues; quand l'idée germe elle m'appartient, elle
correspond a quelque chose de personnel et de profond,
à mes sensations, à mes angoisses, à mon vécu.

M.A.: Comment l'idée du tableau vient elle?

A. : L'association de certaines formes entre elles déclen-
che dans mon esprit, dans ma mémoire, certaines images.

M.A.: Lesquelles?

A. : Le PTO déclenche le visage, l'idée du visage, l'image
du visage.

M.A.: Comment peints-tu?

A. : Il m'arrive de peindre les yeux fermés, parfois l'oeil
est une barrière a l'esprit, ma main est aveugle, elle
cré des formes, lorsque le tableau commence a palpiter,
a vivre, mon esprit guide ma main. Au départ c'est ma
main qui a donné l'impulsion. Il y a une interaction
entre la forme qui engendre les images et mon esprit qui
engendre les formes.

M.A.: Comment cela s'ordonne t-il?

A. : Il y a dans le tableau une mise en mémoire de la forme
précédente. Le tableau est la somme de toutes les étapes,
de toutes les formes qui ont servi a son élaboration.
Quand je superpose une forme a une autre, la forme du
dessous si elle est estompée n'en reste pas moins en
mémoire; c'est ce qui donne cet effet de transparence
de mystère. Ces formes deviennent des traces et engen-
drent le phénomène de disparition/apparition.

M.A.: Ce travail ne rend-t-il pas la lecture du tableau plus
ardue?

A. : Plus difficile, oui, mais ce qui est remarquable c'est la
différence d'interprétation que l'on a. Les formes sont
interprétées différemment dans le détail par chaque indi-
vidu mais globalement le tableau est lu de la même façon.
Chacun peut découvrir des formes, des images très diffé-
rentes, car plusieurs tableaux sont imbriqués les uns
dans les autres, de ce fait la lecture n'en est que plus
riche. Globalement c'est souvent la même impression qui
est ressentie à la lecture rapide, mais plus on le regar-
de et plus on le découvre et plus on perce son mystère.
D'ou le danger d'une lecture trop rapide de ce travail.

M.A.: Peut-on classer ta peinture? Peux-tu la situer?

A. : Ce genre de peinture est au carrefour de tous les mouve-
ments : elle est expressionniste, visionnaire, abstraite,
figurative, mystique.

 

ATTENTE huile sur toile 46 x 38 cm

 

 

M.A.: Je ressens tes oeuvres profondément, dans ce tableau je
vois le sainte face du Christ.

A. : Toi tu y vois cela, j'y ai mis un caractère divin, l'essen-
siel c'est le divin. Celui ci est a la fois sur le thème
de la femme, qui est la vie, et de la mort. On y sent
toute la dualité, c'est dramatique plein de vitalité,
cela fascine et dérange à la fois.

M.A.: D'où vient ton inspiration?

A. : Beaucoup de fantasmes, je ne peins que des femmes, du
moins dans cette période. Voici six toiles: six femmes,
mais symbole de vie et de mort. On a perdu le sens du
tragique, il faut le retrouver.

M.A.: Que faut-il pour qu'une oeuvre soit bonne?

A. : Il faut qu'elle parle a l'oeil et à l'esprit. Elle peut
etre spectaculaire mais creuse, elle devient bonne quand
elle allie beauté esthétique et beauté spirituelle, alors
le peintre est à la fois peintre et philosophe : la no-
tion de méssage est importante.

M.A.: Que doit-être un bon peintre?

A. : Le problème c'est qu'un humaniste peut faire de la mau-
vaise peinture car il n'aura pas les acquis techniques.
Il faut à la fois un bon artisan et un bon philosophe. La
technique ne suffit pas cela peut être mort si ce n'est
pas habité par le spirituel.
M.A.: Il y a beaucoup d'énergie dans tes oeuvres.
A. : Nous vivons dans un monde où la rapidité est essentielle,
j'ai du trouver des techniques qui me permettent de
transmettre rapidement mes pulsions et mes passions. Je
travaille comme un sculpteur, créant forme et couleur.
C'est une façon de travailler qui communique beaucoup
d'énergie au tableau, de spontanéité et de force.
Si ma technique est assez inhabituelle elle se place dans
la tendance actuelle d'un retour a une peinture plus dra-
matique, plus vraie, mais aussi beaucoup plus libre, plus
riche, qui apporte quelque chose aux hommes.

 


LA JEUNE FILLE huile sur toile 65 x 54 cm

 

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